Voici quelques extraits de Journal et Poèmes d’Izumi-Shikibu dans la traduction de René Sieffert, édité chez Pof-Poètes du Japon.
Toutes les soirées
Je voudrais les transformer
Sans qu’il existât au monde
Ce que ténèbres l’on nomme
Les fleurs tant qu’elles sont
Je voudrais qu’elles devinssent
Fleurs de cerisier
Sans qu’il existât au monde
Ce que défleurir on nomme
À tous les humains
Je voudrais pouvoir porter
Sentiments pareils
Sans qu’il existât au monde
Aimer ou ne point aimer
* * *
[...] Du feuillage des arbres naguère coloré, rien ne subsistait, le ciel était clair et dégagé ; regardant le soleil qui se couchait, le cœur serré, selon usage, elle lui écrivit :
J’ai beau mon seigneur
me dire que vous êtes là
pour me consoler
lorsque vient le crépuscule
je me sens mélancolique.
(Prince)
Tout un chacun certes
Lorsque vient le crépuscule
Le ressent ainsi
Et plus que tout autre vous
Qui le dites la première.
Cette pensée me point le cœur. Ah ! que je voudrais accourir sur l’heure. » Le lendemain, aux premières lueurs de l’aube, alors que tout était blanc de givre, il lui écrivait : « En cet instant, comment vous sentez-vous ? »
Ce matin de givre
À l’aube d’une longue nuit
Passée dans l’attente
En effet plus que toute chose
Au monde est mélancolique.
Tels étaient les propos qu’ils échangeaient. Ce qu’écrivait le prince, comme de coutume, était empreint d’émotion.
(Prince)
Seul de mon côté
Penser et penser à vous
Ne nous mène à rien
Ah puissiez-vous madame
Le ressentir comme moi.
(la poétesse)
Que vous et moi soyons
Vous là-bas et moi ici
Après tout n’importe
Si votre cœur et mon cœur
Jamais ne sont séparés.
Cette image figure dans Hyakusin Isshu (Cent poèmes de cent poètes), une compilation de poèmes japonais de l'époque médiévale.
Elle concerne Izumi Shikibu, 56e poète de cette anthologie.